La transition écologique est-elle un axe fort de la stratégie de Nexity ?
Nexity est originale car notre entreprise est présente sur toute la chaîne de valeur immobilière, depuis l’aménagement de terrains, y compris le réaménagement d’anciennes friches industrielles ou urbaines (nous réalisons un quart du village des athlètes des JO de Paris), jusqu’à l’exploitation et la gestion d’immeubles (nous sommes n° 1 français du property management et n° 2 de l’administration de biens après Foncia), en passant par la promotion de bureaux et logements (avec 20 000 logements par an, nous sommes le premier promoteur résidentiel en France). Cela nous amène à penser et à gérer ensemble tous les aspects de la transition environnementale et donc à la placer au cœur de notre stratégie.
Quand j’étais Directrice des Finances de la Ville de Paris, j’ai constaté les réactions des habitants contre la politique de réduction du trafic automobile, et celles des jardiniers à qui on a désappris à « faire propre ». J’ai compris à la fois l’urgence d’agir et la nécessité d’accompagner cette transformation.
À mon arrivée au sein de Nexity en tant que Secrétaire générale, j’ai eu sous ma responsabilité la RSE. En devenant la patronne des activités tertiaires, j’ai ensuite été en contact direct avec nos clients pour qui le sujet de la transition environnementale est particulièrement sensible : pour que les bâtiments puissent être faciles à remettre sur le marché, ils doivent être le plus possible en avance de phase pour répondre aux enjeux climatiques, énergétiques et environnementaux. Aujourd’hui à la tête de Nexity, je continue à placer ces enjeux au cœur de notre action.
Qu’est-ce qui tire les progrès environnementaux de Nexity : le marché, les actionnaires, les salariés ?
D’abord, et c’est à la fois dans notre ADN et porté par notre raison d’être « la vie ensemble », nous avons, en tant qu’entreprise responsable et bâtisseur de la ville de demain, une responsabilité envers la planète et le monde qui nous entoure. Je suis également convaincue qu’une ville bas carbone, respectueuse de la biodiversité, est une ville plus douce, plus désirable, plus créatrice de liens. Et que c’est cette ville-là que nous devons pousser.
Bien sûr, il y a aussi une attente forte de nos clients et partenaires : la rénovation urbaine occupe ainsi une part grandissante dans nos activités, renforcée par notre dialogue avec les collectivités locales qui se tournent de plus en plus vers des opérations de requalification, à l’échelle de quartiers ou de bâtiments. Toutes les équipes s’adaptent et ont développé les savoir-faire nouveaux nécessaires : matériaux écologiques, bâtiments mixtes habitat-bureaux, réhabilitations, transformation de l’usage de certains bâtiments… Le marché suit sur certains points, tire sur d’autres : en Ile-de-France en bureau par exemple, nous ne faisons pratiquement plus que de la réhabilitation ; en ville, les clients particuliers n’exigent plus du neuf, mais sont soucieux d’acheter des logements aux dernières normes environnementales.
D’ailleurs, l’anticipation de ces normes en amenant de nouvelles solutions est clé pour réduire les coûts de construction : si l’on se contente d’empiler les normes, le surcoût, de l’ordre de 10 %, n’est pas acceptable pour le marché. Grâce à cette anticipation, nous étions prêts dès 2021 avant que la Réglementation environnementale RE2020 (exigence de performance énergétique et carbone pour les bâtiments neufs) ne s’applique (au 1er janvier 2022).
Parce que 85 % des bâtiments actuels seront là en 2050, nous travaillons aussi le sujet de la rénovation énergétique du parc existant. C’est un enjeu majeur. Nous avons déjà conduit 60 rénovations de copropriétés et proposons d’étudier systématiquement leur financement par la surélévation des immeubles, le plus souvent en bois ; nous avons 300 dossiers à l’étude, et c’est aujourd’hui un gros avantage sur le marché.
Force est de constater que, pour l’instant, le marché financier ne récompense pas vraiment l’ambition RSE. Nous commençons en revanche à trouver des financements et des assurances plus avantageux si nous réalisons nos engagements de performance.
Qu’attendez-vous des pouvoirs publics ?
La réglementation nous oblige à embarquer les différentes problématiques de développement durable et deux grands défis en particulier : la ZAN (zéro artificialisation nette) et la rénovation des logements existants. Pour la première fois, la loi Climat et Résilience aborde ainsi la rénovation du stock de logements. Nous avons rapidement écrit à nos clients propriétaires de logements étiquetés DPE F ou G que nous gérons pour les alerter et leur proposer un accompagnement complet pour les travaux et les aides financières. Beaucoup de ces logements vont arriver sur le marché avec une décote de 5 à 15 % selon leur étiquette, car les propriétaires de ces passoires ne veulent ou peuvent pas y faire de travaux. Les pouvoirs publics devraient préparer une vraie planification de ces sujets, y compris en mobilisant les financements adéquats, privés et publics.
La fiscalité est structurante, mais a parfois des effets pervers : par exemple, la suppression de la taxe d’habitation affaiblit le lien entre les collectivités locales et les habitants ; de son côté le nouveau dispositif Pinel oblige à faire des logements plus grands alors que la ZAN devrait conduire à une ville plus compacte, voire à des nouvelles manières d’habiter en rupture avec les dernières décennies.
La réglementation pourrait aussi favoriser des innovations telles que des logements sans chauffage, ou des bâtiments mixtes logements-bureaux. Je suis une avocate de la densité désirable, du moment qu’elle est bien construite, agréable à vivre. Et je considère que les entreprises ont leur rôle à jouer pour présenter un futur désirable et notamment dans la construction de nouveaux consensus sociaux sur ce qu’est la ville durable de demain. D’ailleurs, chez Nexity, les jeunes sont particulièrement moteurs de cette transformation. Il y a de quoi rester optimiste.